8h05 : du vacarme au silence – la magie des routines de classe
Il est 8h05, la sonnerie vient de retentir.
Une vingtaine d’adolescents déboulent dans la salle : rires, bavardages, des papiers qui volent.
J’essaie de parler, mais ma voix se perd dans le brouhaha.
J’ai déjà perdu les 10 premières minutes de cours.
Ce scénario, je l’ai vécu trop souvent.
Avoue, toi aussi tu as déjà connu ça.
Jusqu’au jour où j’ai décidé de mettre en place de vrais rituels – simples, constants, mais puissants.
Ces routines ne viennent pas de nulle part : plusieurs études en psychologie de l’éducation confirment leur efficacité.

Image par Dylan Agbagni de Pixabay
« La gestion de classe est à mes yeux l’élément le plus important à maîtriser en enseignement. … De là vient l’importance d’instaurer des routines et des règles claires avec vos élèves dès le début de l’année. »
Élodie Goulet Pedersen
Accroche-toi, c’est parti.
Les 3 grands avantages des routines de classe
Les routines, c’est un peu comme les rails d’un train : une fois posés, le convoi avance dans la bonne direction sans qu’on ait besoin de corriger sans cesse la trajectoire.
Concrètement, cela amène :
- Un climat de classe apaisé
Les routines de classe donnent une structure rassurante.
Les élèves savent à quoi s’attendre, quand parler, quand écouter. Ce sentiment de prévisibilité réduit l’anxiété et les comportements perturbateurs. - Un gain de temps considérable
Quand chaque début de cours suit le même schéma (entrée, installation, vérification du matériel…), les transitions se font naturellement.
Moins de perte de temps = plus de minutes effectives d’apprentissage. - Une autorité naturelle, sans élever la voix
Le rituel remplace les rappels constants.
L’enseignant n’a plus à répéter « Asseyez-vous ! Sortez vos cahiers ! » — la structure parle à sa place. Cela installe une autorité calme et cohérente.
Prends une grande inspiration, on démarre.
1. Le geste simple que 90 % des profs oublient (et qui change tout)
Il reste 3 minutes avant que mon cours débute.
J’attends ma classe de 11e (3e en France) sur le pas de la porte.
« Bonjour Quentin, comment ça va ce matin ? » dis-je en lui regardant dans les yeux et en lui serrant la main.
« Salut Émilie. »
« Bonjour Marco, alors comment s’est passé ton tournoi de tennis ? »
Les élèves défilent, je les salue un à un.
Je veille à créer du lien avec mes élèves : ne pas les considérer comme une masse, mais comme des individus.
Pourquoi ce petit rituel change tout (avantages concrets)
- Il augmente immédiatement l’engagement.
Accueillir un élève par son prénom, lui sourire, lui poser une question brève montre qu’on l’a vu.
Les études montrent que ce type d’accueil augmente le time on task (le temps effectif de travail) et diminue les comportements perturbateurs.1 - Il facilite une relation enseignant-élève plus positive.
Être accueilli fréquemment par un professeur développe le sentiment d’appartenance et la confiance : ces relations positives sont corrélées à de meilleurs résultats scolaires et à une plus grande motivation à l’école.
En bref : les élèves qui sentent que l’enseignant « tient à eux » travaillent plus.2
En pratique, ça donne quoi ?

Conseils pratiques — comment transformer ce rituel en habitude efficace
- Bref et sincère : 2–5 secondes par élève suffisent. L’important, c’est que ce soit sincère, pas scripté.
- Inclusif : adapte selon les élèves (certains préfèrent un hochement de tête, un « high five » discret, ou pas de contact physique). Respecte le cadre culturel et les préférences individuelles.
- Position : devant l’entrée ou légèrement sur le seuil. Pas besoin d’entrer dans de longues conversations.
- Suivi discret : si un élève semble en difficulté, note-le mentalement et parle-lui en fin de cours (pas en public).
C’est fait ?
On pourrait s’arrêter là, mais non.
2. Le silence avant tout : instaurer le cadre dès la première minute
30 juin 2008, je commence mon école de recrues en Suisse.
J’ai 19 ans et c’est l’âge légal pour le service militaire obligatoire.
Tous les matins, c’est le même rituel : l’appel et les instructions de la journée à venir.
Nous sommes près de 120 jeunes recrues, intimidées par nos supérieurs, à nous tenir debout et alignés au millimètre.
Personne ne bouge, sauf quand on nous ordonne de passer de la position de « repos » à celle de « garde ».

Je ne sais pas combien d’heures j’ai passé ainsi, mais ce dont je me souviens c’est qu’importe la météo, la canicule ou sous une pluie battante, c’était le même rituel tous les matins.
Des fourmis dans les jambes et des tensions dans mes épaules apparaissaient parfois…
Interminable.
Mais quel est le rapport entre mon service militaire et les routines de classe ?
C’est simple.
Tous mes cours commencent ainsi, depuis 2013 : les élèves doivent se lever au début de la leçon.
Je ne les invite à s’asseoir que lorsque le silence est total.
Cela marque clairement le début d’un nouveau cadre d’attention : « Tu viens de la récré, d’une pause ou d’un autre cours — ici, c’est autre chose. »
Ça te paraît old school ?
Oui, ça l’est, mais c’est diablement efficace.
Alors évidemment ils ne restent pas des heures debout en plein soleil.
Par contre, je n’hésite pas à attendre 1-2 minutes jusqu’à que j’aie l’attention de tous.
« Bonjour, asseyez-vous. »
Et le cours commence.
Dans le calme.

Pourquoi demander aux élèves de se lever au début du cours est une routine de classe hyper efficace ?
- Elle marque une rupture claire avec le reste de la journée. Se lever crée une transition physique et mentale entre la récréation, les couloirs ou le cours précédent et le moment d’apprentissage.3
- Cette routine installe le cadre sans cris ni rappels à l’ordre. Les élèves savent que tant qu’ils ne sont pas silencieux, le cours ne démarre pas.
Prêt à demander à tes élèves de se lever pour commencer tes cours ?
Peut-être que cela te gêne de le leur demander.
Cela fait depuis plus d’une décennie que mes étudiants se lèvent à absolument toutes mes leçons et personne ne s’est jamais plaint…
Alors pourquoi pas essayer ?
Accroche-toi, la suite va te plaire.
3. Le contrôle du matériel qui impose le respect (et qui motive en plus)
L’odeur de café flotte dans la salle des professeurs.
Il est en train de pleuvoir, l’eau ruisselle sur les vitres : on est au mois de novembre.
Une jeune collègue prof de maths, Sarah, se plaint que ses élèves n’ont quasiment jamais leur matériel de cours.
Elle me raconte qu’elle perd un temps fou à chaque leçon le temps qu’ils aillent chercher leur règle, leur compas ou leur manuel dans les casiers situés dans le couloir, quand le matériel n’est pas oublié à la maison…
Profitant de ce moment de flottement, les élèves discutent entre eux ou s’amusent à se jeter des boulettes de papier.
Deux élèves se sont mêmes approchés de Sarah pour lui demander de leur faire une photocopie de la fiche qu’ils ont perdue.
Elle se rend alors à la photocopieuse, laissant les élèves seuls.
À son retour, le bruit est comme une enceinte au volume bloqué sur « max » : chaque élève veut couvrir le bruit des autres.
Sarah perd à nouveau du temps à rétablir l’ordre, n’ayant jusqu’à présent rien pu enseigner.
À ton avis, quel a été le déclencheur de cette situation qui a empiré minute après minute ?
C’est simple : le fait que des élèves n’avaient pas leur matériel.
Ensuite, tout s’est enchaîné…
La routine magique pour que tous les élèves aient enfin leur matériel
Dès le début du cours, je demande à tous les élèves de lever leur matériel, élément par élément : cahier, stylo, livre, calculatrice…
La vérification dure à peine 2-3 minutes, mais elle change tout.
Si toute la classe a ce qu’il faut, un point bonus est accordé collectivement pour le prochain test.
Il suffit qu’un seul élève oublie quelque chose, et le point est perdu pour tout le monde.
Très vite, la pression du groupe joue son rôle : les oublis disparaissent presque totalement.
Pour les élèves distraits qui arrivent encore les mains vides, je note leur nom et leur confie un petit travail supplémentaire adapté à la matière : conjuguer des verbes en français, compléter une fiche de calcul en mathématiques, etc.
Rien de punitif, juste de quoi ancrer l’idée que venir préparé, c’est plus simple et plus agréable pour tout le monde.
Quelques idées de travaux supplémentaires prêts à imprimer :
- français : générateur gratuit de fiche de conjugaison.
- maths/économie : générateur gratuit de fiches de calculs
Sinon voici 3 travaux au format PDF à donner à tes élèves qui ont n’ont pas leur matériel. Ils sont compatibles avec toutes les matières.
Tout est inclus (consignes, lignes pour rédiger, etc.).
Tu as juste à les imprimer. Les documents sont :
- Recherche et réflexion sur l’importance du matériel scolaire. (PDF 1)
- Étude de cas : l’élève sans matériel. (PDF 2)
- Lettre d’engagement : “Je serai prêt pour apprendre” (PDF 3)
Tu as aussi des difficultés à gérer le bruit en classe ?
Alors je t’invite à lire l’article suivant : 9 Techniques Infaillibles pour la Gestion du Bruit en Classe (et Obtenir le Silence).
Prêt pour la suite ?
4. Repartir du connu pour aller vers l’inconnu
Je sais que tu es enseignant.
Tu as fait des études de pédagogie.
Mais est-ce que tu vérifies au début de leçon si les élèves ont bien assimilés les points clés du cours précédent ?
Le réflexe oublié qui évite bien des pertes de temps
Pourquoi je te pose cette question ?
Car moi-même je ne le fais pas systématiquement : par oubli ? par flemmardise ? par peur de « perdre du temps » ?
Un peu des trois j’imagine.
Concrètement, de quoi je parle ?
Comment vérifier la compréhension sans y passer 20 minutes
- Demander à haute voix : « Levez la main ceux pour qui ce n’est PAS clair à 100 % les enjeux des tensions entre l’Inde et le Pakistan. »
5 mains se lèvent timidement.
« Ok merci. Parmi ceux qui ont compris, qui peut les expliquer en quelques phrases ? »
Facile à mettre en place et ne prend que quelques minutes.
Ci-dessous, la version collective : quand personne ne peut se cacher. - « Ouvrez vos cahiers depuis la fin, pour ne pas voir la théorie copiée de la dernière fois et numérotez de 1 à 5. »
Puis, pose des questions rapides sur ton cours précédent en demandant à tes élèves d’écrire des réponses courtes, la forme n’est pas importante.
Fais ensuite une correction collective et tu peux même leur demander de compter leurs points.
« Levez la main ceux qui ont faire 5/5, 4/5, etc. »
L’avantage ?
Tous le monde est actif dès les premières secondes de classe et cela te permet de partir sur de bonnes base pour poursuivre ton cours.
De plus, de part le comptage de points, tu vois d’un coup d’oeil si la notion est maîtrisée ou non.
Pourquoi ce petit rituel rend ta classe plus calme (et plus efficace)
Cette vérification rapide du début de cours n’a rien d’anodin.
Elle montre aux élèves que tu es organisé, que chaque minute compte, et surtout que tu veux vraiment qu’ils apprennent quelque chose.
En démarrant ainsi, tu installes une atmosphère de sérieux sans élever la voix.
Ce rituel, c’est un signal : ici, on apprend, on avance, et on le fait ensemble.
On arrive maintenant à la dernière étape, et pas des moindres.
5. On quitte la salle, pas la discipline
9h26, il reste 4 minutes de cours avant la pause de la matinée.

Après avoir posé 2-3 questions rapides pour vérifier la compréhension de la leçon du jour, je prononce la phrase suivante :
« La première colonne prête peut sortir. »
En un instant, tout se déroule comme dans un atelier d’horlogerie suisse : chaque geste est précis, chaque élève connaît sa place dans le mécanisme.
Quelques secondes plus tard, la salle est rangée, les tables alignées, les chaises levées et les élèves debout en silence.
Tu veux toi aussi mettre ça en place dans ta classe ?
Tu vas voir, c’est tout simple.
Pour que les élèves puissent sortir de la classe en fin de journée ou à la pause, les conditions suivantes doivent être réunies :
- les chaises contre ou sur les tables ;
- les tables sont alignées par colonne. Ne pas hésitez pas faire de l’excès de zèle sur l’alignement ;
- aucun papier ne jonche le sol ;
- les élèves sont debout à leur place en silence.
Si toute la colonne respecte ces 4 conditions, alors l’ensemble de la colonne peut sortir de la salle.
Par contre, il suffit qu’un élève chuchote ou qu’une table ne soit pas bien alignée, alors l’ensemble de la colonne est pénalisée et ne peut pas aller à la pause.
Parfois, je vois des collègues en train de balayer leur salle.
Pour moi c’est exclu, je ne vais pas ramasser le bazar de mes élèves.
« La première colonne prête peut sortir. » Pourquoi ces 6 mots sont hyper puissants ?
Cette simple phrase, après avoir évidemment expliqué en quoi cela consiste, te permet :
- d’avoir ta salle entièrement rangée et prête pour le cours suivant en quelques minutes ;
- d’asseoir ton autorité jusqu’à la dernière seconde de cours ;
- d’implémenter un esprit de compétition entre les colonnes et d’entraide au sein du même groupe.

Et tu sais quoi ? Ça marche vraiment.
Même avec des ados de 15 ans.
Même avec des classes difficiles.
À toi de jouer, maintenant.
The number one problem in the classroom is not discipline; it is the lack of procedures and routines.
Harry K. Wong
(Le problème numéro un dans les salles de classe n’est pas la discipline, mais le manque de procédures et de routines.)
Ces routines ne sont pas suffisantes pour gérer ta classe difficile ?
Je t’invite alors à télécharger Ton kit gratuit pour reprendre le contrôle de ta classe dès demain.
Les 5 routines résumées en une seule infographie

Et toi, quels rituels utilises-tu dans ta classe ? Dis-le-moi en commentaire.

Laisser un commentaire